Le monastère de la Sainte-Croix de Khizan [Hizan] est situé au sud-est de la ville nouvelle de Khizan [Yeni Hizan, Karasu] dans le canton arménien d’Ichayr, à 38° 11’ N et 42° 31’ E. Il est établi en altitude au-dessus du débouché de la vallée de Chinitzor, ou Chinatzor [***], dont il porte également le nom, sur les hauteurs du village de Sourp Khatch (« Sainte-Croix ») [Simhaç,Ağılözü].
Angle ouest, 1973 (Fonds N. et M. Thierry).
L’architecture particulière de son église, dont le plan n’a pas d’équivalent dans le domaine arménien, a fait supposer une influence byzantine et une édification probable aux alentours de l’an mil. Le monastère est déjà un scriptorium productif au XIVe siècle et constitue, avec les monastères de la Sainte-Mère de Dieu de Paritzor (n° 24) et de Saint-Gamaliel, l’un des foyers de l’école de copie et d’enluminure de Khizan, qui perdurera jusqu’au milieu du XVIIe siècle. Élève des abbés Jean (Hovhannès) et Cyriaque (Guragos), le copiste Jean, dit le Rhéteur, y brille en 1382 déjà, puis, sous l’abbatiat de Baptiste (Mgrditch), jusqu’en 1413 ; dans son sillage apparaît l’évêque Étienne (Sdép‘annos), affilié à la Sainte-Croix en 1414, mais qu’on retrouve abbé de Saint-Gamaliel en 1431. Il faut citer, parmi bien d’autres copistes et enlumineurs plus généralement représentatifs de cette école, le miniaturiste Jean de Khizan (Hovhannès Khizantsi, attesté de 1390 à 1417), et Mardiros de Khizan (Mardiros Khizantsi ), qui achève en 1604 un synaxaire commandé par le bourgmestre Khodja Khatchig de la lointaine Djoulfa, le père d’une lignée de bourgmestres qui se succèderont à Isfahan à la tête du faubourg de la Nouvelle-Djoulfa, devenu au XVIIe siècle et jusque dans les années 1720 le centre du grand commerce arménien. Si le prieur Isaac (Sahag) est mentionné en 1750 en tant que docteur et théologien, son homonyme, dans les années 1870-1880, doit avant tout protéger le monastère et ses biens des incursions et des pillages des beys, dont les hommes, quelques décennies plus tôt, avaient assassiné dans ses murs le catholicos d’Aght‘amar Harout‘iun Ier d’Ardonk‘ (Harout‘iun Ardonétsi, 1816-1823). Certes, il entreprend d’en restaurer les bâtiments conventuels, mais le monastère est investi et tous ses biens accaparés au cours des massacres de 1895.
Le monastère de la Sainte-Crois de Khizan ou de Chinitzor, comprenait :
Plan (Thierry, 1989, 382)
• L’église triabsidiale de la Sainte-Croix, du tournant des X-XIe siècles, église en croix inscrite de 12,5 × 14,3 m, à coupole de briques et piliers en dièdre – dont deux engagés dans le mur ouest – , à chambres latérales au-dessus des absidioles et chambres occidentales ouvertes dans les bras nord et sud ;
• Un narthex à coupole centrale à décor de briques, prolongeant l’église de 6,4 m vers l’ouest ;
• Des bâtiments conventuels et une fontaine.
Le monastère a été confisqué après la Grande Guerre. La coupole et l’angle nord-est de l’église se sont effondrés en 1950. Cependant, l’église était encore debout en 1973, de même que son narthex. En 2012, il ne restait de ces deux édifices que quelques vestiges de murs et plus rien des autres constructions. On en trouve des pierres, encore marquées de croix, dans les maisons.
Épriguian, 1903-1905, II, 170-174. Akinian, 1920, 168. Oskian, 1940-1947, III [1947], 855-862. Kurdian, 1951, 21-22, 66-68. Thierry, 1989, 380-384. Devgants, 1991, 173, 229.